Catégories
Carnets de route

Première neige !

Un court message pour vous partager notre émoi d’hier lorsque nous avons découvert que la pluie se transformait petit à petit en neige… de moins en moins fondante. Nous sommes partis de la pension Adela sous une belle tempête de neige. La première de l’année, au moins un mois en avance. Consternation dans toute la région. Les routes ont été bloquées, fermées, congestionnées. Bref, c’était comme le première neige à Paris; tous les médias diffusaient les images en boucle. Neige à Brasov, mais vent violent sur la côte et dans le sud du pays. Des inondations (encore), des arbres tombés, les ports fermés… Mais avant de savoir tout ça nous avons naïvement pris la route en espérant rallier Brasov pour prendre le train de 17h. Il ne nous a pas fallu beaucoup de temps pour nous rendre compte que c’était mission impossible. Heureusement, nous avons pu jeter les sacoches et les vélos dans le compartiment bagages du train régional. Le trajet durait 20 min. Assez pour contempler les paysages enneigés.

A Brasov, pour passer les quelques heures avant notre départ, nous nous sommes réfugiés dans une pizzeria pour prendre un café. Le propriétaire, ébahi de nous voir arriver sous la neige, dans le froid, est sorti nous accueillir. Il nous a ensuite raconter que lorsqu’il a entendu Elouan appeler du chariot, n’en croyant pas ses oreilles, il a cru que c’était une sonnerie de téléphone. Il semble que notre situation l’ai particulièrement touchée car après nous avoir offert de la soupe chaude et du pain à volonté, il nous a proposé de nous loger dans une chambre vide de son appartement en attendant que la météo s’améliore. Ce que nous avons fait avec plaisir, courant à la gare pour échanger nos billets de train.

Bien que nous soyons confortablement installés, trop sans doute, nous allons partir aujourd’hui. Ils annoncent -7 degrés ici demain. Encore un peu venteux sur la côte mais 10 degrés plus chaud. Ils seront les bienvenus!

 


 

Catégories
Carnets de route

Balade automnale

Après avoir passé deux jours à Alba Iulia aux abords de la gare à chercher une solution pour nous déplacer au sud du pays, nous avons constaté que cela était bien compliqué. Pour prendre le bus, nous devons démonter et emballer nos vélos. Quant aux trains, ils nous offrent deux minutes d’arrêt pour monter notre chargement. Bref, c’est un peu mission impossible. Installés au chaud dans une petite cantine, nous avons pris la décision de continuer plus à l’est, au pied des montagnes, en espérant que le temps s’améliore et nous permette de les traverser du côté de Brasov.

Bien évidemment, dès que nous reprîmes la route, le ciel s’est mis à faire des siennes. Pendant 3 jours, nous avons eu droit à un bon vent de face et des températures rappelant plutôt les vacances de la Toussaint. Ce n’est pas toujours commode mais cela nous attire l’empathie dans beaucoup d’endroits que nous traversons.

A Pianu de Jos, alors que nous demandions notre chemin, et que deux villageois se querellaient pour savoir quel était le meilleur itinéraire à suivre, une dame nous a proposé de venir chez elle pour nous requinquer un peu. Il n’était que 10h30 mais nous y sommes allés de bon cœur.

Devant la porte de sa maison, une pierre tombale. Celle de son fils de 4 ans, heurté par une voiture il y a 14 ans. Cette dame a tout de suite pris les enfants d’affection. Elle s’est mise à rigoler en regardant les deux dents de Yanaël sachant qu’elle n’en avait pas beaucoup plus. Mère de 9 enfants, ces 7 plus grands vivent et travaillent en Espagne. Le dernier a 16 ans et pratique son espagnol ppour rejoindre la fratrie. Comme souvent, la table est venue se garnir de produits de la maison, les légumes du jardin, le fromage, la confiture, le gras de cochon (que nous avons encore du mal à apprécier au petit déjeuner) et le pain confectionnés sur place. Sandrine me raconta plus tard qu’elle lui a demandé si elle avait allaité ses enfants. Elle répondit par l’affirmative, presque deux ans chacun, et pour pièce à conviction, souleva son t-shirt pour montrer sa généreuse poitrine en remerciant Dieu. Bien évidemment, elle ne portait pas de soutien-gorge. Sandrine un peu gênée, n’a pas fait la même chose se demandant si c’était une tradition.

Nous sommes repartis de là émus. Elle s’est mise à pleurer avant que nous partions en nous disant de faire attention aux enfants.Touchés par cette histoire, nous y avons pensé toute la journée. C’est certainement pour ça que nous avons craqué vingt kilomètres plus loin quand nous vîmes un petit chiot tout penaud sur le bord de la route. Nous avons découvert qu’il vivait dans le caniveau à côté du cadavre de son frère. Encore une histoire macabre. Nous avons supposé qu’ils avaient dû se faire abandonner par leur mère et Sandrine s’est mise en tête de sauver le petit animal. Elle a aménagé un petit espace dans sa sacoche guidon et nous sommes partis à l’épicerie pour acheter du lait avec ce nouveau compagnon.

Malheureusement, le petit chien était bien mal en point et il n’a pas survécu. Malgré nos tentatives de soin, il a succombé au bout de deux jours. Nous étions tristes mais à la fois soulagés, un chien dans l’histoire ne nous aurait pas facilité la tâche. Ainsi dimanche, à l’heure de la messe, nous avons pris le temps d’aménager une petite tombe sur le bord de la route avant de continuer notre chemin vers Sibiu.

En arrivant le soir dans la ville, nous avons commencé à parlementer pour savoir où nous allions passer la nuit. Je ne voulais plus pédaler et surtout pas sortir de la ville pour trouver un endroit où mettre la tente. Sandrine me rétorqua que nous nous étions déjà payés une pension la veille et les chambres de Sibiu étaient chères. La mayonnaise montait bien entre nous lorsqu’un beau jeune homme est venu nous parler. Il nous a donné plein de conseils et notamment un endroit où nous pouvions camper à 5 kilomètres du centre-ville. Adieu chambre chaude, retour sous la tente à manger des pâtes.

Comme souvent quand nous nous arrêtons en ville avec les vélos, nous suscitons beaucoup de curiosités et les passants les moins timides viennent nous poser toute sorte de question. Nous avons eu la chance de rencontrer Roxanna. Elle est venue spontanément nous proposer de dormir dans l’appartement qu’elle partage avec son compagnon alors que nous étions assis sur un banc. Nous y sommes finalement restés deux jours. Comme les quelques fois où nous rencontrons des gens de notre âge, la différence culturelle disparaît et nous pouvons échanger longuement sur nos situations respectives. Marius est acteur et gère une vie professionnelle bien remplie. Roxanna est également dans le milieu théâtral et galère un peu pour trouver du travail dans son domaine. Ils projettent de partir à vélo d’ici quelques temps. Ces deux jours auront permis à Sandrine de se remettre d’une indigestion de placenta, spécialité roumaine bien grasse. Pas étonnant que cela rende malade avec un nom pareil.

Ce fut un peu difficile de repartir. Pour la première fois, Sandrine a craqué. Elle s’est mise à me parler d’une petite maison avec un feu de cheminée. Mais bon, une fois repartis, on oublie assez vite le confort intérieur.

Entre Sibiu et Brasov, nous avons traversé beaucoup de villages saxons. Ces villages sont aujourd’hui majoritairement habités par des Tziganes.Les saxons ayant progressivement quitté la Roumanie après la chute du communisme. Ici, les hommes arborent de beaux chapeaux de feutre à large bords et les femmes de belles jupes et beaux fichus colorés. A Mergenthal, un monsieur est venu nous proposer de passer la nuit dans sa maison, la plus grande du village. Lorsque nous sommes arrivés dans la cuisine, il y avait 3 Herman, 2 victor et 2 Nicolae. La tradition tzigane veut que l’on donne le nom du père au premier fils de la famille. C’est assez pratique pour Sandrine qui a souvent du mal à se souvenir des prénoms. Notre hôte Herman à 39 ans est déjà 4 fois grand-père. Une autre tradition tzigane veut que l’on se marie jeune. Il s’est marié à 14 ans et a eu son premier enfant à 15 ans. Nous avons passé la soirée à discuter, intrigués par cette communauté que nous connaissons peu et dont on nous dit de se méfier depuis notre entrée en Roumanie. Nous nous sommes pourtant sentis très bien avec eux. Herman, Maria et leur fils ont fait preuve d’une très grande gentillesse et de beaucoup de sincérité ne nous cachant pas que derrière l’apparente opulence, leur quotidien était souvent difficile. Herman part chaque année pendant 6 à 8 mois à Paris pour travailler. Là-bas, il vit dans une petite baraque sous le périphérique qu’il reconstruit à chaque descente de police. Il arrive à trouver des petits boulots au noir par ci par là mais ça ne semble pas être la joie. Sa femme l’accompagne de temps en temps mais c’est encore plus dur pour elle. Sans qualification et ne parlant presque pas français, il lui reste la mendicité pour ramener un peu d’argent. Peu à peu, ils rénovent leur maison pour en faire une petite villa. Ils leur restent encore beaucoup de travail mais je ne doute pas qu ‘un jour, ils auront une belle maison.Pour le moment, la belle demeure n’offre pas toutes les commodités auxquelles on pourrait s’attendre. Pas d’eau courante, pas de douche ni de toilettes. Au moment du coucher, Sandrine me demanda « Où sont les toilettes ? ». Je lui répondis «C’est simple, c’est la porte à côté des vaches et des cochons, il faut traverser le hangar où il y a des moutons et il faut tourner à gauche. »Comme dans la plupart des maisons à la campagne, les toilettes sèches sont à l’extérieur à côté de la porcherie.

Nous sommes depuis dimanche à Rasnov à vingt kilomètres de Brasov. Nous séjournons dans une petite pension bien sympathique. Compte tenu des températures, le séjour en tente devient difficile. Nous avons eu droit à notre première gelée matinale.J’ai eu la désagréable surprise de me réveiller et de constater qu’il faisait 0°C dehors. J’avoue ne pas avoir très bien dormi mais Sandrine m’a dit qu’elle n’avait pas eu froid.

Après un printemps pourri, l’automne commence de façon brutale. Notre projet de traverser les montagnes du côté de Brasov tombe à l’eau. Ils annoncent de la neige pour les jours à venir, nous allons donc prendre le train pour nous rendre au bord de la mer. Un petit raccourci de 400km qui, nous l’espérons, nous permettra de gagner quelques degrés.

Par contre, ce ne sera pas parfait non plus du côté de Constanta. Les prévisions météorologiques annoncent des températures inférieures de 10 degrés par rapport aux normales saisonnières pour toute la semaine sur tout le pays. Nous espérons seulement que le froid ne va pas s’installer pour de bon.

PS : Yanaël a soufflé sa première bougie mercredi dernier. Enfin, Elouan l’a un peu aidé. Notre petit garçon va bien même s’il a un peu la goutte au nez. Nous sommes heureux de le voir grandir et commencer à se déplacer. Le temps où il restait sagement assis sur le plaid est depuis longtemps révolu. En quête de liberté et d’espace, nous devons sans cesse être derrière lui. Les terrains où nous sommes sont souvent jonchés de matériaux pas très adéquats pour un bébé d’un an. Des crottes, beaucoup de crottes, de la laine, des cailloux et du bois, il expérimente à sa façon les joies du voyage.

Ronan

Statistiques du 5ème mois :

884km parcourus (4070km depuis le départ)

5650m de dénivelé ascendant (26 846m depuis le départ)

24 jours pédalés

36,83km / jour roulé

24,29€ par jour (28,12 €/jour depuis le départ)

14 nuits en camping sauvage

7 nuits en camping payant

3 nuits en pension

7 invitations spontanées